L’infantilisme du Rebuild of Evangelion.

Une critique vilipendant le dernier projet d’Anno Hideaki.

Ce papier, né de lectures diverses, aimerait amener à une réflexion à l’aune de la sortie du deuxième film. Comprenez bien, avant de poursuivre la lecture, que tout ce qui est écrit ici est donc fondamentalement faux, car sera obligatoirement démonté quand la suite sera sortie. Il s’agit d’un exercice de réflexion, que je souhaite vous faire partager. Est ce pertinent d’en parler, en ce cas ? Je me dois de répondre par l’affirmative. En cherchant un peu le web, on ne trouve pour ainsi dire rien de vraiment réfléchis sur cette oeuvre ; du moins dans les médium de communications récents types blog, fansites et autres, et j’apprécierais volontiers des liens divers et variés de lecture pour les longues soirées de cet hiver. Les gens se bornant à l’art, aisé, de la critique, voir review pour les plus fainéants, sans chercher plus loin. Je vous propose de suivre un peu l’art, malhabile de mes doigts certes, de l’analyse.

A sa sortie, Evangelion est une série qui a démolis plusieurs lieux communs : l’anime n’est pas que pour les enfants, l’anime peut traiter de sujets sérieux de manière intelligente, l’anime n’est pas qu’un simple produit de consommation, l’anime est une forme d’expression. Ces remous prennent évidemment un sens particulier quand on s’attarde sur le faite qu’il s’agisse d’une série télévisuelle (et non d’un film, sinon il aurait été facile de citer Akira, par exemple). Véritable pamphlet révolutionnaire d’un produit de consommation de masse envers ce dit public, l’accès à une frange massive de la population lui a assuré son succès et sa reconnaissance. Le produit en lui même, fondamentalement otaku, a eu ce sacré culot de mettre une baffe à son public premier au passage, à l’aide d’une fin, si ce n’est surprenante, pour le moins inattendue de ce genre de production.

Par Boyaking.

Quel est la cause de tout ce ramdam ? Son anti-héros tout d’abord. Tellement bien créé qu’il reste le point de mire des détracteurs de la série 15 ans après. Il est un cliché personnifié de l’otaku japonais, vivant seul, reclus, rejetant volontairement le monde environnant pour vivre dans le sien,  rejetant sa « famille ». A cet égard, la montée de zéro à héros tout du long de la première moitié de la série, totalement subvertie dans la seconde partie, est magistrale. La vision de notre monde dépeinte par Anno et son équipe est d’ailleurs très bien faite, et montre à quel point l’otaku ne peut décemment, selon leur point de vue, trouver sa place dans le monde moderne. Malgré ses essais pour se sentir bien, son statut de déchet le ramène à ses angoisses premières, le fait replonger rapidement (appuyé, il est vrai, par une évolution violente du scénario).

La fin, citée plus haut, est en cela inattendue que rien, je dis bien rien, n’y prépare durant le reste de la série. Je ne parle pas ici du Plan de Complémentarité, mais du traitement effectué pour le représenter dans ces deux derniers épisodes. La série se retrouve donc découpée en trois arcs distincts de 13, 11 et 2 épisodes respectivement.

Les codes narratifs sont modifiés en profondeur. Répétition sur-accélérée, longs monologues de questionnement, abandon complet de tout les arcs précédents de par le Deus ex Machina que représente la Complémentarité (ce qui à ce jour est un cas rare, tout genre d’oeuvre confondus). Ils amènent à une réflexion sur la manière de procéder à la représentation, à un jeu avec un public (d’)habitué. Ils ouvrent la voix au message voulu sur la fin par Anno.

Les codes graphiques sont sens dessus dessous. Passages griffonnés, fameuses lignes blanches représentant les discours, passages en caméra live. Tout peut arriver, car les auteurs ont posé comme point d’ouverture une recréation du monde, illustré ici par leur monde-oeuvre. Balancé au milieu d’une série de manière aléatoire, ils n’auraient aucune raison valable d’exister, n’auraient aucun sens. L’episode 25 nous prépare en « cassant » volontairement ce qui représente les codes d’un anime. Cassage illustré par les brisures apparaissant à l’écran.

Je ne m’étendrais pas plus sur le sujet pour le moment, car le matériel nécessaire à la suite est déjà cité. De plus, d’aucun auront déjà eu le temps d’y réfléchir en 15 ans. Toujours est il qu’Eva en tant que série télévisuelle continue de déranger de par son statut d’oeuvre problématique, par l’absence voulu de réponse à ses questions.

Auteur inconnu.

Mais qu’en est il donc de ce fameux Rebuild ?

Nous l’avons bien vu, depuis sa sortie il enchaine les critiques élogieuses, les textes enjoués et les faveurs bénéfiques de tous. En tirant à fond sur la corde nostalgie, en jouant avec le fan, il amène certes à une autre vision, mais pas à une refonte quelconque pour le moment. Quand on regarde l’autre film sur Eva, End of Evangelion, force est d’avouer que la voix prise, bien qu’inverse symbolique de la série TV, est aussi beaucoup plus que cela. Non seulement dans sa débauche orgiaque de sang, de sexe et de pathos, mais aussi dans ses interrogations d’un tout autre niveau. Son statut de fin alternative est dûment mérité, et n’est pas le pur fruit du hasard ou d’un relâchement de la part de l’équipe en charge.

Le spectateur obtient des films léchés. D’une qualité graphique et d’animation sensationnelles, un scénario apparemment maitrisé, des personnages attachants. Il ne sera pas étonné de voir des débauches de sang sur fond de chorale collégienne en 2009, et trouvera le choix judicieux, pour ne pas dire « trippant ». Il ne haussera pas le sourcil devant les quelques écrans de fumés propres à la série, se disant qu’après tout, c’est plus classe d’avoir une clef de nabuchodonosor qu’une clef du placard. Il se dira que les films vont un peu vite, mais après tout, les personnages ont le temps de se développer suffisamment. Il suffit de voir ce kawai concours de cuisine, très bien rendu. Anno doit être un réalisateur formidable, il faudrait que je vois le reste de son boulot.

Par Gangan.

Aheum, bref. Le spectateur obtient son anime tout public, avec des robots qui se bastonnent, du grand spectacle et tout ce qui va avec.

Pourtant, en y réfléchissant, force est de constater divers couac dans la machine actuelle. Le premier film, en terme de « Rebuild » est une vaste blague. Copie quasi conforme de la série, avec ses 70 et quelques pourcent de storyboard directement repompés, les quelques modifications ne sont la que pour appâter le commun, lui promettre du changement dans la suite. Ce qui amène à cette première interrogation : si l’oeuvre devait être refaite, pourquoi repartir sur les mêmes bases ? Pour ne pas perdre le fan ? Pour lui faire comprendre que la suite allait le surprendre à un point inimaginable ? Un lifting graphique ne suffit pas à faire un bon remake. Notre chère Amrith se sentait tout jouasse de voir ce fameux passage de l’opération Yashima au cinéma. Personnellement, l’impact TV me semble bien plus important, touchant un public fondamentalement plus large, et surtout pas la pour les mêmes raisons qui poussent à aller voir ce Rebuild au cinéma. Surtout qu’a l’époque, la série était diffusé en après-midi, pas à une heure particulière dédiée aux otaku pur jus qui n’ont pas ce besoin de se lever le lendemain à six heures pour aller s’échiner au boulot. Ce choc frontal avec un public vaste, avec cette frange « commune » de la population est une vrai force pour la série (et cela explique d’ailleurs les tensions divers qu’il y a eu entre la prod et GAINAX a l’époque).

Là ou le commun se délecte de feuilletons bourrés d’héroisme, de tensions incroyables, d’actes de bravoure, Eva offre une alternative saugrenue, avec sa loque humaine, ses enjeux incommensurables et in-mesurables, trop haut pour le simple. Qui n’a pas voulu protéger Rei de son statut de fille perdue, sans âme ? Qui n’a pas éprouvé de la pitié pour Asuka et sa vantardise cachant mal ses troubles profonds ? Qui n’a pas été interloqué par la tristesse et la solitude de Shinji ? GAINAX en est conscient, ils vont à l’encontre de ce qui se fait d’habitude. Ils rejettent la catharsis aisée des problèmes ardus mais résolubles. Le héros ne résout rien, ni sa vie, ni celle de ses comparses, ni la problématique de la série (protéger l’humanité de l’ennemi). Même si, comme dis plus haut, la première moitié progresse vers un « meilleur », elle ne le fait que pour retomber plus bas, plus profondément dans le dérangeant et le malsain, dans le questionnement.

Par Ki (iverson).

Ce qui nous amène au second film. Pourquoi avoir doté Rei de sentiments ? Pourquoi avoir fait virevolter Asuka aussi rapidement de point de vue ? Et quand je dis ça, je parle en rapport avec la série TV. On a l’impression qu’Anno s’amuse à faire exprès de les tourner à l’envers. Pourquoi cette régression d’œuvre de réflexion à œuvre d’action ? Au jour d’aujourd’hui, on a l’impression de voir un simple pastiche dédié au spectacle qu’un Eva. Quelles sont les interrogations, anciennes ou nouvelles, que ces films soulèvent ?

Nous avons des films mieux maitrisés, mieux faits, mais à quel prix. Anno s’annonçait comme le seul dépositaire du leg Eva, la personne capable de redorer l’animation japonaise. Or pour le moment il ne fait que suivre le modus imposé par sa série, le seul finalement profondément retenu par le médium : l’habillage classieux et les méthodes pour faire ressortir des émotions particulières à l’écran. La série tombe de manière grossière dans la case « divertissement » sans rien de plus à rajouter. A trop vouloir jouer avec le fan, on a l’impression d’y perdre au change.

Comme je l’ai signalé en préambule de ce texte, nous n’en sommes qu’a la moitié du projet. D’aucuns me diront « C’est d’Anno qu’on cause mec. », et ils auront raisons. J’ai espoir et grande hâte de voir la suite. Mais le doute est instillé pour ma part. J’espère que la fin ne sera pas un repompage de la série télé car cela annoncerait la mort de toute crédibilité du projet. J’espère me tromper.

3 Responses to “L’infantilisme du Rebuild of Evangelion.”

  1. Tabris dit :

    T trop kon :p

  2. Rukawa dit :

    Ah. Ce sont les vacances.

  3. Aer dit :

    C’est surtout que je l’ai commencé il y a trois mois celui la.